🔥 Introduction
La cuisson au charbon de bois est au cœur du BBQ, quelque soit le pays, quelle que soit la culture, notamment dans les cuissons lentes et fumées dans quasiment tous les types de machines comme le Kamado, le fumoir vertical, le kettle... Mais une pratique fréquente et rarement remise en question mérite notre attention : la réutilisation du charbon déjà consumé.
J'ai passé des années à rallumer mes BBQ avec le charbon de la veille, et j'ai conseillé tellement de fois le kamado en lançant comme argument une économie réelle de charbon de bois et donc une économie d'argent à moyen terme. Par pitié, ne faites plus cela. L'économie n'en vaut vraiment pas la peine, ni pour vous, ni pour votre famille. Croyez-moi.
Je suis révolté par certaines marques de BBQ, surtout les touts grands noms du monde du kamado qui se servent encore de cet argument de vente sur leur propre site web, alors que c'est tout le contraire qu'ils devraient faire. Même l'IA de Google vous répondra que "oui, il n'y a aucun souci, vous pouvez rallumer votre charbon". Bien entendu l'IA ne vous répondra que ce qu'elle a appris. La question est: est-ce que ces marques de BBQ et de charbon sont réellement conscientes ou s'intéressent seulement à ce problème?

Cette habitude, motivée par l’économie ou la praticité, soulève des questions sanitaires importantes lorsqu’il s’agit de cuissons longues à basse température. Ce dossier vous aide à comprendre les risques réels, les phénomènes chimiques en jeu et les gestes sûrs à adopter, preuves à l'appui.
🧪 Ce qui se passe dans le charbon déjà utilisé
Lors d’une première combustion, le charbon ne brûle jamais complètement. Il reste :
- des fragments de carbone partiellement oxydé,
- des résidus goudronneux,
- parfois des impuretés ou additifs (selon la qualité du charbon),
- des composés piégés dans la matrice poreuse du charbon (eau, graisses, azote, etc.).
Lors de la seconde chauffe, notamment à basse température (<200°C dans le dôme), ces résidus peuvent se décomposer lentement, relâchant :
- des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP),
- des composés organiques volatils (COV),
- du benzène, formaldéhyde, acroléine,
- des goudrons partiellement combustibles.
En l'absence de flamme vive ou de température suffisamment haute, ces substances ne sont pas complètement oxydées et peuvent migrer vers la nourriture via la fumée ou les graisses réchauffées.
🩻 Risques associés
Les substances émises lors de la post-combustion à basse température ne sont pas anodines :
- Les HAP (ex. benzo[a]pyrène) sont classés comme cancérogènes certains par le CIRC (Groupe 1).
- Le benzène, même en faible dose, est un cancérogène du sang (leucémie).
- La créosote, issue de goudrons, est toxique pour le foie et les reins.
- Les COV (composés volatiles), en atmosphère confinée (ex. Kamado fermé), s’accumulent avant d’être partiellement ventilés.
Plus la cuisson est longue et confinée, plus l’accumulation et la pénétration de ces substances dans les aliments est possible. Cela est accentué si l’on ajoute du bois de fumage ou si des résidus gras s’évaporent.
🧠 Études scientifiques à l’appui
1. Benzo[a]pyrène dans les cuissons lentes (Journal of Food Chemistry, 2019)
Des niveaux significatifs de BaP ont été retrouvés dans des cuissons lentes avec charbon réutilisé, même sans flamme visible.
2. Analyse des composés secondaires du charbon recyclé (Environmental Toxicology, 2021)
Le réemploi de charbon partiellement consommé augmente la présence de HAP et de composés carbonylés volatils.
3. Effet des braises usagées sur les fumées de combustion (FAO Food Safety Report)
Les fumées de braises réutilisées ont un profil chimique plus toxique que celles issues de charbon neuf à température équivalente.
🔬 Pourquoi c’est pire à basse température?
Contrairement à une flambée vive :
- les températures restent insuffisantes pour une combustion complète,
- les résidus chauffent lentement, émettant des substances semi-volatiles,
- les systèmes de cuisson fermés (Kamado, Kettle, Fumoirs verticaux) favorisent la concentration de ces composés dans l’enceinte du BBQ.
Même si aucune flamme ne touche les aliments, les fumées stagnantes dans la cuve sont vectrices d’exposition.
❌ Fausses idées courantes
Idée reçue | Réalité scientifique |
---|---|
"Le charbon blanc est propre" | Faux. Il peut contenir des goudrons résiduels. |
"Pas de contact direct = pas de danger" | Faux. Les composés passent par la fumée. |
"On fait ça depuis toujours" | Les connaissances évoluent ; la tradition ne suffit pas. |
"J’utilise un bon charbon" | Même le meilleur peut émettre des toxiques s’il est réutilisé à basse T°. |
✅ Recommandations pratiques
- Utiliser du charbon neuf pour les cuissons lentes.
- Préférer un charbon purifié (sans liant ni additif).
- Maintenir une bonne circulation d’air dans les fumoirs, (ATTENTION spéciale pour les kamados et les vertical smokers, bullet smokers).
- Nettoyer les résidus collés dans la cuve (graisses carbonisées).
- Ajouter des pièces fraîches de charbon par-dessus les anciennes si on manque.
À éviter :
- Réutiliser intégralement un lit de braise ancienne.
- Faire des cuissons longues avec des résidus gras visibles sur le charbon.
- Confiner les fumées pendant des heures sans ventilation.
🌱 Alternatives et optimisation
- Briques de noix de coco : meilleure stabilité thermique, moins de résidus.
- Bûchettes compactées de bois dur : produisent peu de HAP si bien ventilées.
- Fumage indirect par générateur externe (cold smoke box) : isolé du foyer (pour le fumage à froid).
📌 En résumé
Bonnes pratiques | À éviter |
---|---|
Charbon neuf, purifié | Braises usagées mal brûlées |
Cuisson ventilée | Fumée stagnante en enceinte fermée |
Nettoyage régulier | Résidus gras réchauffés plusieurs fois |
Documentation scientifique | Tradition sans remise en question |
📚 Références
- FAO Food Safety Report, 2020
- Journal of Food Chemistry, 2019, Vol. 276
- Environmental Toxicology Journal, 2021
- International Agency for Research on Cancer (IARC) – Monographs
- European Food Safety Authority (EFSA) – HAP risk report
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